Ce Road Trip, c’est peu dire que nous l’avons attendu. Voilà presque 9 mois que nous avions pris nos billets pour Vancouver et réservé notre Van vintage made in 80’s (sobrement prénommé Easy Rider par son propriétaire).
Après avoir survolé le Groenland par un vol direct express d’à peine 9h, on arrive sous un soleil radieux dans la ville de Vancouver, récemment classée 3ème ville la plus agréable au monde. Je suis plutôt du même avis mais il ne faut pas omettre un quartier effrayant concentrant un nombre hallucinant de junkies défigurés au Fentanyl, véritable horde de morts vivants, fort heureusement ignorant notre présence.

 
Tout parait immense : les rues, les trottoirs, les buildings, les parcs, les arbres, les Canadiens, les Canadiennes, les burgers et effectivement Vancouver ne manque pas d’atouts : ses plages et ses terrains de Beach Volley en plein Downtown, ses bars où les bières locales coulent à flots, son parc Stanley gigantesque terrain de jeu pour ces férus de sport : vélo, course à pied, skateboard. Et comme si ce n’était pas suffisant, Vancouver est entourée de magnifiques montagnes qui abritent d’autres trésors comme les ponts suspendus des forêts de Capilano à plus de 70 mètres de hauteur.

Ces premiers contacts avec la nature sauvage aiguisent nos envies de démarrer la seconde partie de notre voyage : le Road Trip à bord de l’Easy Rider. Première difficulté : il faut récupérer l’Animal à Vernon à près de 500 km de Vancouver. Nous optons pour un bus de nuit, easier and cheaper.

Day 1 : Easy Rider

Jeff nous attend sur le parking et nous emmène voir la bête.
Waouw, notre van est encore plus stylé que ce que nous avions imaginé : les sièges sont molletonnés, le sol est calfeutré par une jolie moquette, enceintes 5.1, double port USB, frigo, freezer, mini chauffage, double plaque de cuisson, évier à pompe tout ça dans un petit style retro sexy (le van date de 1981 !). Je conseille d’ailleurs ce bougre de Jeff à tous les aventuriers qui aimeraient visiter la région : https://www.vantasticrentals.com/ Nous remplissons nos placards de moult victuailles et décidons de prendre la route immédiatement.
A nous la liberté !

Notre première étape s’appelle ClearWater, les nuages sombres se reflètent sur ce lac d’un calme absolu. Après une sieste nécessaire, on en profite pour se dégourdir les guibolles à flanc de falaises autour des vertigineuses Chutes Spahat qui semblent éclabousser les environs d’un fin crachin.
De retour dans notre fraîche tanière après avoir débroussaillé notre itinéraire dans la région d’Alberta, on décide de sauter le souper et de s’emmitoufler collés serrés.

Day 2 : Le Trail du Lac Kinney

Levés aux aurores, nous profitons une dernière fois de la quiétude de ClearWater et nous reprenons la route vers le parc national de Jasper.


La route est à elle seule fabuleuse : vieilles locomotives tirant au ralenti des milliers de wagons rouillés, montagnes recouvertes de sapins accueillant l’automne dans un dégradé de verts ou encore des ponts vieillissants enjambant des rivières d’un bleu glaciaire.


Nous salivons devant de superbes saumons sauvages pour finalement se rabattre sur un BBQ maison sous le soleil en plein milieu d’une compétition de trail. Encouragés par ces sportifs amateurs, nous enfilons nos godillos à l’attaque du Mont Robson pour un premier trek digne de ce nom jusqu’au lac Kinney.
L’arrivée au lac vaut à elle seule les efforts engagés, je vous laisse en juger :

Nous reprenons la route pour entrer dans Jasper sous les derniers rayons dorés accueillis par un majestueux mâle Wapiti et ses congénères pas stressés pour un sou de nous voir débouler à quelques mètres du troupeau. On élit domicile au bord du lac Annette, encore une fois seuls au monde.

Day 3 : Tête à tête de bois

La nuit glaciale n’est pas encore terminée que nous écarquillons nos yeux : nous ne sommes pas bien sûrs mais si, c’est bien un nouveau troupeau de wapitis qui nous encercle pour nous saluer.


Le temps est à la pluie, on quitte Annette Lake pour engloutir d’infects pancakes. Oppressés par des serveuses toujours plus pressantes, nous décidons de prendre la route du célèbre lac Maligne.
La route tortueuse et vallonnée croise tour à tour des canopées luxuriantes et des forêts anéanties par de récents incendies. Nous ne sommes pas les seuls à avoir eu l’idée d’aller visiter le lac Maligne : des hordes asiatiques s’attaquent au lac à coup de pagaies (100$ la demi heure, mieux vaut avoir le coup de pagaie efficace !)
Petits rats musqués que nous sommes, nous privilégions la voie pédestre oubliée des touristes.

Voilà près de 4 jours que nous ne nous sommes pas douchés et ça commence à fouetter !


Je ne peux faire endurer tel supplice plus longtemps à ma dulcinée, en bon prince charmant, je lui dégotte une douche bouillante (et à l’oeil dans un spa de luxe siouplait !)
On pose notre monture à quelques millimètres du lac Patricia en admirant un coucher de soleil photoshopé.

 

Day 4 : Valley of the 5 lakes

Un soleil rose se pose sur le lac Patricia en guise de réveil et transforme les galets en barbe à papa.


Nous décidons de rechausser les crampons pour arpenter la vallée des 5 lacs, une randonnée merveilleuse (et facile) qui permet de slalomer entre 5 (!) lacs plus beaux les uns que les autres avec chacun une couleur qui lui est propre.

Notre van avale les kilomètres en s’octroyant quelques pauses méritées pour admirer des chutes d’eaux puissantes et trop souvent meurtrières : les chutes d’Athabasca et les chutes Sunwapta.


On traverse ensuite comme une flèche les glaciers bondés pour crapahuter le mont Bow et aller se nicher au cœur de la forêt dans un froid polaire : il fait près de 0°C dans le van.
On décide de dormir tout habillés.

Day 5 : Le schtroumph Peyto

Après une grasse matinée indécente, nous nous attaquons au Mont Bow pour disposer d’une vue imprenable sur le lac Peyto d’un bleu irréel comme un gigantesque cocktail au curaçao.


La montée hors des sentiers battus est ardue et l’idée de nous retrouver nez à nez avec un grizzly commence à m’effrayer. Nous retrouvons tant bien que mal un chemin qui nous dépose à la source du lac Peyto après près de 3h30 d’enjambées entre racines et rochers.
On remonte prestement ouf ! on a évité et l’ours et l’ondée.
On arrive dans le second parc national de notre périple et certainement le plus touristique des deux : Banff. Lestés d’un double cheeseburger, on pointe le nez sur l’eau bleue du Lac Louise, lui aussi, arpenté par des dizaines de canoés. Un château Walt Disney surplombe le lac et ses monts enneigés.

Day 6 : L’inoubliable Moraine

Avertis du caractère unique du lac Moraine (l’accès est fermé pour la journée à partir de 7h du matin, et la beauté des lieux n’est donc accessible qu’à une poignée de privilégiés).
Parce qu’on ne laissera pas le wagon passer, on est les premiers sur le pont.
On y voit quedal.
Il fait nuit noire.
On se gèle les miches.
Il est 5h30.

On sautille en silence et rapidement nos yeux s’habituent à la pénombre, le ciel s’éclaircit et les nuages dévoilent un reflet parfait des montagnes glacées. On escalade une colline de rochers pour prendre de la hauteur, bientôt rejoins par quelques clampins suréquipés. Le spectacle peut vraiment débuter, le public est muet, comme médusé.
Un paysage d’eau, de glace, de forêt, d’une beauté inouïe se dévoile sous nos yeux. Véritable film silencieux à peine troublé par un chanceux badaud, fier comme un i, solo sur sa planche de paddle.

Le ciel se couvre à nouveau et une lourde pluie met fin à cette parenthèse féérique. Humides et épuisés, nous décidons de quitter Banff.
On lâche 30$ pour une seconde douche salvatrice à Golden, back to humanity !

Days 7 & 8 : La ville fantôme

Le retour à Vernon se fait sous la pluie et aussi confortable qu’il puisse être, le van et nos nuits glaciales ne favorisent pas un dynamisme débordant.
On atterrit par hasard dans une ville fantôme (3 Valley Gap), véritable musée figé d’un temps révolu. L’endroit regorge d’antiquités accumulées, une vie durant, par la passion d’un seul homme soucieux de pouvoir transmettre cet héritage du passé.

Nous rendons notre carrosse sans accrocs et remontons dans le bus qui doit nous ramener vers Vancouver et un lit chaud et moelleux.

En écrivant ces lignes, je ne suis pas encore certain de mesurer la chance partagée d’avoir pu découvrir cette contrée. Gigantesque et démesurée, puissante et colorée, si sauvage que l’Homme n’y est encore que de passage.